Entretien avec Pierre-Philippe Cormeraie, Chief Digital Evangelist du Groupe BPCE
Le Groupe BPCE est le deuxième plus grand groupe bancaire en France. C'est également le premier à avoir lancé un portail open data. Nous nous sommes entretenus avec le chief digital evangelist du groupe pour en savoir plus sur ce projet.
Avant toute chose, pourriez-vous nous en dire plus sur la genèse du projet de partage de données au sein du groupe BPCE ? Avec quels objectifs de base êtes-vous partis ?
Nous avons décidé de lancer notre portail de données en open data en droite ligne de notre stratégie de transformation numérique. Celle-ci vise à rendre les choses simples pour nos clients, pour nos collaborateurs et pour nos partenaires.
Ce projet est né d’une belle rencontre. La rencontre entre notre volonté d’ouverture et de simplicité vis-à-vis de nos communautés de partenaires et la proposition de valeur de la plateforme de publication de données développée par Opendatasoft. Cette initiative repose sur deux axes de travail : un axe interne et un axe externe. L’axe interne nous permet d’acculturer les différentes entités du Groupe sur l’open data, d’échanger sur ce que cela regroupe, ses enjeux et ses opportunités.
L’axe externe nous permet de nous rapprocher de l’écosystème open data en France qui, on peut le noter, est particulièrement dynamique et ouvert à la co-création et au partage d’expériences. Beaucoup de collectivités ainsi que de nombreuses entreprises dans les transports, l’industrie, la météo ou l’énergie, par exemple, sont déjà très actives dans ce mouvement de l’open data. Nous venons nous joindre à ces acteurs pour permettre à tous de travailler plus vite et d’inventer ensemble de nouveaux modèles.
Quelle est la nature des données que vous partagez ? Le type de jeux de données publiés a-t-il beaucoup évolué depuis le début de votre démarche ?
Il n’y a bien entendu ni de données personnelles, ni commerciales sur le portail open data du Groupe. Nous rendons uniquement accessibles les données publiques des entreprises du Groupe BPCE dans des formats facilement réutilisables par tous. Le catalogue de jeux de données est dynamique et constitué de données structurées, fiables et centralisées, mises à jour par des collaborateurs en charge des données et de leur fiabilité. Les données sont disponibles sous forme de tableaux chiffrés mais aussi sous forme graphiques, sous forme de cartographies interactives et même de calendriers.
Ces jeux de données sont fournis par de nombreuses entités : les « recrutements en CDI par tranche d’âges » sont publiés par la DRH, les résultats du Groupe et leur historique par la direction financière, les Banques Populaires et les Caisses d’Epargne proposent la liste géolocalisée de leurs agences bancaires et distributeurs de billets. Certains établissements publient leurs initiatives solidaires au bénéfice des plus fragiles et la direction des études et prospectives met à disposition des analyses dont les données deviennent ainsi réutilisables facilement.
Très récemment, la Fédération Nationale des Banques Populaires et Natixis Payment ont publié en open data une étude sur les paiements de proximité réalisés par les voyageurs étrangers dans les régions et départements français. C’est une première en France qui offre une nouvelle clé de lecture sur le dynamisme des régions.
Certains secteurs adoptent une démarche open data pour répondre à des exigences réglementaires précises. Est-ce le cas pour le secteur banque et assurance ?
Notre initiative ne correspond pas à une demande réglementaire et aucune banque en France ne s’était, avant nous, lancée dans une vraie démarche open data, C’est une démarche volontariste de notre part en cohérence avec notre stratégie numérique et data. J’observe que d’autres confrères s’intéressent de plus en plus à notre initiative et nous espérons être rejoints par d’autres acteurs du secteur dans un avenir proche. Cela permettra au secteur banque et assurance d’apporter de la valeur au sein de l’écosystème open data en France.
J’imagine que la gouvernance des données est un vrai sujet dans votre secteur. Comment gérez-vous cela au sein du groupe BPCE ?
La gouvernance des données est un des enjeux clés de la direction en charge du numérique et data pilotée par Yves Tyrode, directeur général du Groupe BPCE. Nous venons d’ailleurs d’accueillir au sein de son comité de direction, Ludovic Favarette en tant que Directeur Gouvernance et démocratisation de la Data, en charge de l’animation et du déploiement de la gouvernance et de la culture data au sein du groupe.
Notre métier, vous le savez, est « Privacy by design ». Les données bancaires de nos clients sont leur propriété et ne nous appartiennent pas. Nos clients nous en confient leur sécurité et leur gestion dans le cadre d’une relation de confiance et de secret bancaire. En matière d’open data, nous ne partageons donc que les données publiques propres à nos entreprises ainsi que des études. Toutes les entités du groupe qui le souhaitent peuvent publier leurs données publiques sur le portail du groupe.
Quels sont les principaux bénéficiaires du projet de partage de données du Groupe BPCE ?
Les principaux utilisateurs des données que nous mettons à disposition sont des analystes, des journalistes, des chercheurs, des enseignants, des étudiants, les autres acteurs de l’open data, des collectivités locales, des chambres de commerces, des acteurs du transport, des startups … et même des collaborateurs du groupe qui trouvent intérêt à accéder par ce canal à certaines données publiques. Vous le voyez, les premiers bénéficiaires sont déjà nombreux.
Si vous deviez convaincre un acteur de votre secteur à entamer une démarche open data ou partage de données, que lui diriez-vous ?
Je lui dirais que selon moi, c’est une démarche qu’il est urgent d’entreprendre car elle est dans le sens de l’histoire, dans le sens de mettre à disposition les données publiques de son entreprise pour permettre au plus grand nombre de pouvoir y accéder et de créer de la valeur. Toujours selon moi, tous les secteurs d’activité devront tôt ou tard adopter l’open data soit de manière volontariste, soit parce que le régulateur l’exigera. Alors autant s’y préparer au plus tôt, on gagne toujours à innover.
Deux ans après le lancement de votre portail, quels bénéfices avez-vous déjà pu en tirer ?
Les bénéfices sont nombreux. D’un point de vue externe, notre initiative est saluée par la communauté et reconnue par de nombreux experts comme une démarche de long terme, qui se construit mois après mois, de manière régulière. Nous rencontrons d’ailleurs régulièrement les parties prenantes de l’écosystème open data et participons activement à des Meet Up pour échanger sur nos différents jeux et construire des modèles originaux permettant de créer de la valeur. Cela permet aussi à nos experts data d’échanger avec leurs pairs et imaginer de nouveaux possibles.
D’un point de vue acculturation interne, nous avons fait une partie du chemin pour expliquer ce qu’est l’open data et ce que ce n’est pas. Plusieurs entreprises du groupe ont compris et se sont lancées dans la démarche avec succès. Coté chiffres, nous avons à ce jour publié plus de 110 jeux de données et une vingtaine d’entreprises du Groupe contribuent régulièrement à la démarche open data.
Comment voyez-vous évoluer le projet de partage de données au sein du groupe BPCE ?
Nous n’en sommes qu’au début de l’open data et le chemin parcouru depuis le 1er jour est passionnant. C’est une démarche de construction à petits pas réguliers qui nous permet d’évoluer sereinement dans une démarche de co-construction en phase avec notre ADN mutualiste et notre proximité avec les acteurs qui comptent en région. L’open data a, de plus, toute sa place dans le cadre de notre stratégie numérique et data et permet à tous d’aller plus loin en créant de la valeur en interne comme en externe. Une belle histoire à suivre donc !
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