Gouvernance des données : comment adopter une stratégie efficace ?
Quelles sont les mesures à mettre en œuvre pour créer un programme de gouvernance des données au sein de votre organisation ? Comment assurer que cette stratégie de gouvernance viendra soutenir vos objectifs en matière de démocratisation des données ? Nous avons interrogé l'experte Nicola Askham pour en savoir plus.
Démocratiser la donnée dans votre organisation requiert des règles communes concernant la mise en qualité, la publication ou encore la réutilisation des données. C’est pourquoi la gouvernance est un pilier fondamental de toute stratégie de démocratisation de la donnée.
Face à la nécessité croissante d’exploiter le potentiel de gros volumes de données, les programmes de gouvernance des données se multiplient dans les organisations de tous les secteurs. Pour en savoir plus sur ce sujet, nous avons interrogé l’experte Nicola Askham.
Forte de près de 20 ans d’expérience dans le domaine, Nicola Askham s’est donnée pour mission d’aider les organisations à mieux comprendre et mieux gérer leurs données grâce à un accompagnement pratique, des conseils et des programmes de formation autour de la gouvernance.
Comment vous êtes-vous spécialisée dans le domaine de la gouvernance des données ?
Je travaillais à l’époque pour une grande banque et je me demandais pourquoi les données du projet sur lequel je travaillais étaient aussi médiocres. Je suis allée à une conférence sur la gouvernance des données et j’ai eu une révélation : je me suis rendue compte qu’on devait mettre en place les structures permettant à des personnes d’être responsables de données et de leur qualité si l’on souhaitait en tirer de la valeur. J’ai ensuite évolué vers le conseil et ai finalement opté pour la formation et le coaching afin de proposer aux responsables data la possibilité d’acquérir les compétences et la confiance nécessaires à la réussite de leurs projets.
Tout au long de ma carrière je me suis focalisée sur les aspects pratiques, en cherchant les bons modèles de gouvernance de données pour chaque organisation. Car chaque entreprise est différente et doit créer une stratégie de gouvernance qui réponde à ses besoins spécifiques. Cela implique de développer les compétences et les ressources internes sur le long terme.
Pourquoi la gouvernance des données est-elle aussi importante pour les organisations aujourd'hui ? Quels bénéfices peuvent-elle en tirer ?
Quand j’ai démarré ma carrière, la gouvernance des données se limitait à certains secteurs réglementés tels que les services financiers, où les entreprises devaient mettre en place des mécanismes de contrôle de leurs données pour répondre aux réglementations. La plupart du temps, la gouvernance était vue comme un poste de dépenses supplémentaires dont les bénéfices n’étaient pas bien identifiés.
Aujourd’hui tout le monde a pris conscience de l’importance d’adopter une démarche “data-centric” et les organisations automatisent le plus de processus possibles. La gouvernance des données est capitale lorsque l’on s’inscrit dans cette démarche : si vous ne comprenez pas vos données, vous n’aurez aucun résultat. Une solide stratégie de gouvernance permet de réduire l’inefficacité et les coûts et améliore l’expérience client à long terme. La pandémie de Covid-19 a révélé la nécessité de déployer de telles stratégies. Les dirigeants ont dû prendre des décisions difficiles et ont eu besoin de données pour s’assurer que celles-ci étaient aussi justes et pertinentes que possible.
Quel est le rôle de la technologie pour démocratiser les données ?
Tout le monde a un rôle à jouer dans la création, le partage et l’utilisation des données de son organisation. Offrir un point d’accès unique à des informations compréhensibles et à jour est indispensable pour décloisonner les services et inciter les différents interlocuteurs à communiquer.
La plupart des personnes utilisent les données dans le cadre de leur travail et les voient souvent comme une contrainte ou ne savent pas vers qui se tourner lorsqu’elles sont de mauvaise qualité ou inutilisables. Si une équipe de gouvernance des données existe, elle peut faire passer le message que la donnée est l’affaire de tous et encourager des bonnes pratiques.
La technologie joue un rôle indéniable. Mais il faut d’abord commencer par la stratégie et les individus avant de choisir une solution de gouvernance des données. Obtenez d’abord l’adhésion des utilisateurs, et ensuite déployez un outil adapté. Sinon ils ne verront pas l’intérêt de la démarche et auront le sentiment qu’on alourdit leur charge de travail en leur imposant encore une nouvelle solution.
Quelles sont les principales erreurs que commettent les organisations en matière de gouvernance des données ?
Je rencontre fréquemment les trois problèmes suivants :
Tout d’abord, les gens ne comprennent pas que la gouvernance des données est avant tout une affaire de changement de culture. Il ne suffit pas de définir un cadre, de le partager et de penser que tout le monde va s’en servir. Un changement de culture est un processus difficile qui se déroule sur le long terme. Déployer une stratégie de gouvernance des données n’est pas un petit projet que l’on peut mener en quelques mois. Beaucoup de personnes sous-estiment l’importance de la communication et de la formation lorsqu’elles déploient leurs programmes dans l’organisation ; or vous devez expliquer l’importance de la gouvernance des données pour espérer susciter une réelle implication.
Ensuite, la gouvernance des données est généralement confiée au service informatique. C’est assez naturel pour de multiples raisons – c’est la technologie qui crée les données et souvent le service informatique est le premier à identifier les problèmes de gouvernance des données. Mais les données n’appartiennent pas au service informatique, elles appartiennent aux différents métiers qui composent l’organisation. Confier la gouvernance des données à une équipe data dédiée est plus logique et peut contribuer à créer des liens entre l’informatique et le reste des collaborateurs.
Enfin, les équipes ont tendance à vouloir en faire trop au lancement de leur projet. Les organisations disposent de très nombreuses données et il est tentant de vouloir régler tous les problèmes en même temps. Mais le programme risque alors de ralentir et de ne pas générer de résultats. Il vaut mieux commencer par gérer les données à forte valeur ajoutée pour démontrer les bénéfices de la gouvernance des données rapidement et créer une dynamique positive.
Quels conseils donneriez-vous à une entreprise qui se lance dans un projet de gouvernance des données ?
Commencez par obtenir l’aval de la direction en leur démontrant l’intérêt d’un programme de gouvernance des données. Replacez votre programme dans le contexte de votre stratégie d’entreprise globale : comment la gouvernance des données peut-elle vous permettre d’atteindre vos objectifs ? Il peut s’agir de réduire les coûts, d’améliorer l’innovation ou encore de renforcer la collaboration.
Il peut également être intéressant de revenir sur les échecs passés causés par la mauvaise qualité des données dans votre organisation, pour montrer comment une stratégie de gouvernance pourrait permettre d’éviter ces problèmes. Il ne sert à rien de chercher à convaincre votre direction en utilisant des exemples d’autres organisations : montrez comment les données de mauvaise qualité nuisent à votre propre fonctionnement. Cela permet de ne pas limiter le projet à un enjeu réglementaire ou de respect des bonnes pratiques et favorise le bon niveau d’engagement. Enfin, même si le déploiement du programme doit prendre du temps, ne vous laissez pas décourager et valoriser les premiers résultats.
Toute entreprise ayant pour ambition de devenir data-centric a besoin d’un Chief Data Officer dont le rôle est de garantir à chaque utilisateur un accès immédiat aux informations dont il a besoin. Découvrez les défis auxquels il est confronté, et quelles sont les stratégies et technologies à adopter pour les surmonter.
Les organisations génèrent des volumes croissants de données, mais à elles seules, ces données brutes ne peuvent pas générer de valeur. Elles peuvent être difficiles à interpréter, au mauvais format ou simplement être trop basiques pour être utiles, c’est pourquoi il est plus que nécessaire aujourd’hui de transformer les données brutes en data assets (actifs de données) et en data products (produits de données) à valeur ajoutée et plus accessibles.
Pour maximiser la valeur de leurs données, les organisations se concentrent à la fois sur la gouvernance des données et sur le data management. Il n'est pas rare de confondre ces concepts qui sont étroitement liés.